Mon 3e accouchement : enfin serein et sans peur
Voilà sans doute la première raison pour laquelle j’ai eu ce 3e enfant : je n’avais pas encore réussi à vivre un accouchement serein et sans peur.
(Une deuxième raison de l’arrivée de ce bébé étant la découverte qu’il existe un juste milieu entre laisser pleurer son bébé et se laisser envahir par lui… question de respect de ses besoins et ses rythmes [encore !] et de décodage de son langage. J’en parlerai dans un prochain article.)
Certes, mes autres accouchements se sont déroulés comme je le souhaitais, chez moi à la maison, entourée de personnes que j’aime, et dans l’eau. Et sans complications. Mais pas si sereinement.
Découvrez comment j’en suis arrivée à préférer accoucher à domicile plutôt qu’à l’hôpital en lisant mon article comparant l’accouchement à domicile et en milieu hospitalier. |
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Flash-back sur mes deux premiers accouchements
Premier bébé
Durant la première grossesse, je m’étais bien préparée avec ma sage-femme, ou plutôt « sage-homme », Jo, qui me rendait visite régulièrement pendant la grossesse pour parler du déroulement du jour J. Et j’avais suivi des classes de yoga prénatales, où l’on nous préparait à faire face aux douleurs « habituelles » de l’accouchement.
« Habituelles » entre guillemets, car ces douleurs sont très variables d’une personne à l’autre, selon le seuil de tolérance de chaque femme, la durée de l’accouchement, la disposition mentale et les circonstances.
Mais ce premier accouchement a été long, très long, et difficile. Plus de 36 heures, avec des contractions très rapprochées pour les 20 dernières heures. Au bout de 24 heures, j’étais tellement épuisée que je demandais qu’on m’emmène à l’hôpital.
Plutôt, Jo a appelé une autre sage-femme qui est venue en renfort avec des plantes à prendre en tisane, qui ont provoqué la rupture de la poche des eaux. Puis, quand l’envie de pousser est enfin apparue, plus de 2 heures se sont écoulées avec la tête du bébé sur le point de sortir, provoquant de fortes sensations de brûlure.
Depuis le début, j’étais envahie par la crainte de ne pas y arriver, la peur de ces douleurs qui ne ressemblaient en rien à ce que j’avais pu vivre auparavant, la hantise qu’en poussant j’allais me déchirer de l’intérieur.
Enfin, 37 heures après la 1re contraction, le bébé (Maxou) est sorti, au grand bonheur de toutes les personnes présentes (y compris mon amie Yasmin, alors enceinte de jumeaux, en proie à des nausées et vomissements récurrents typiques du premier trimestre).
J’ai juré que jamais je ne repasserais par là. Et Maxi, mon conjoint, qui est certainement ressorti plus traumatisé que moi de cette expérience, m’a prise au mot.
Deux ans plus tard, je suis retombée enceinte. Le même mois où j’ai arrêté d’allaiter la nuit.
Deuxième bébé
Cette fois, l’accouchement s’est déroulé en 2 heures. Plus rapide, impossible. Enfin, c’est ce que je pensais.
On s’apprêtait à sortir prendre le petit déjeuner, comme tous les dimanches, quand j’ai eu une envie soudaine d’aller aux toilettes. Plusieurs fois d’affilée. Je pensais que j’avais mangé quelque chose de mauvais la veille. Puis, tout à coup, une première contraction forte. Suivie peu après d’une deuxième. J’attends avant d’appeler Jo, le sage-homme, me disant que ce n’est sûrement pas pour tout de suite.
Mais les contractions s’enchaînent. J’appelle Jo et je demande à Maxi de remplir la piscine d’accouchement, la même que j’avais utilisée auparavant, mais cette fois placée dans le jardin (pas assez de place à l’intérieur dans la maison actuelle, et on est en juin, il fait super chaud).
Je rentre dedans, les contractions sont de plus en plus fortes et rapprochées. Mais je ne veux absolument pas accoucher avant l’arrivée de Jo. Trop peur de faire ça toute seule (sans une aide professionnelle) après la première expérience, presque trois ans plus tôt. J’ai envie de pousser, mais je me retiens, et je demande à Maxi d’appeler la voisine.
Martine arrive rapidement et s’occupe de Maxou pendant que Maxi me prête son bras, auquel je m’accroche férocement à chaque contraction.
Jo arrive enfin, et l’envie de pousser devient subitement irrépressible. Vingt minutes plus tard, le bébé (Ulysses) sort. Plusieurs poussées ont été nécessaires, encore cette sensation de brûlure au passage de la tête, mais c’était finalement bien moins difficile que dans mon souvenir. Ouf.
Maintenant c’est bon, deux enfants, c’est parfait. On ne va plus recommencer : promis, juré, craché !
Deux ans plus tard, je retombe enceinte.
Deux ans tout pile, de nouveau. Juste quand j’arrête d’allaiter la nuit, comme la première fois !
C’est la surprise. Une surprise qui me met dans un état d’euphorie : incroyable d’être à ce point heureuse de recommencer ! Je suis tellement surexcitée qu’à peine le test passé, j’informe la terre entière ! Deux semaines plus tard… fausse couche. Bon, et bien voilà, les choses rentrent dans l’ordre.
Sauf que maintenant plus possible de m’ôter de la tête, ou plutôt du corps, cette envie d’un 3e. Dingue la biologie humaine, ce besoin de se reproduire envers et contre tout. Car avec deux, on a déjà bien assez de boulot. Loin de nos familles, loin des grandes villes, des garderies et autres infrastructures pour enfants, avec une économie fluctuante, on est tous les deux d’accord : ce n’est pas raisonnable.
Mais cette envie est si forte que la biologie l’emporte sur la raison, et six mois plus tard, rebelote. Cette fois, le 3e est bien accroché.
Le troisième accouchement
Au départ, je m’imagine un accouchement « public », je propose à plusieurs personnes intéressées d’assister. Pas pour m’aider, juste pour voir un accouchement « en live ».
Puis à mesure que la date approche, des images toutes différentes m’envahissent l’esprit. Je me vois accoucher la nuit, si rapidement que je le fais seule avec Maxi, les deux autres enfants étant endormis. Je me vois accoucher dans la baignoire (on n’a plus la piscine d’accouchement, et de toute façon je n’aurais peut-être même pas le temps de la remplir).
Cette fois, je sais que je peux y arriver sans Jo. Il m’a fait une liste des différents risques et des marches à suivre (vous pouvez la télécharger en fin de l’article) et je suis tout à fait confiante. Cette fois, je n’ai plus peur.
La date approche, et cette vision devient de plus en plus claire. La dernière semaine, je ressens une très forte pression sur le périnée. Le moindre effort m’est pénible. Je monte la pente qui sépare la voiture de la porte d’entrée de chez nous avec difficulté. Vivement que le bébé sorte !
Puis un soir, alors que je termine le lancement de mon blog, que la maison est rangée, les affaires de bébé organisées et que je me sens prête, je vais me coucher à minuit avec un drôle de mélange d’excitation et d’angoisse. C’est pour cette nuit. J’en suis sûre.
Je m’endors en parlant au bébé : « Tu vas bientôt sortir, n’est-ce pas ? » « Tu vas voir, tout va bien se passer. » « Bientôt on va voir ta petite bouille… »
Deux heures plus tard, je me réveille, le cœur battant. Avec une sensation d’urgence : il faut que je me prépare. Je vais à la salle de bain sortir des serviettes de bain, j’étale un drap imperméable sur le sofa, je nettoie la baignoire. Puis, sans autre signe, je me recouche et me rendors.
À 3h50, une forte douleur me réveille. Ça y est, la première contraction ! Et l’envie d’aller aux toilettes, une fois, deux fois, trois fois, je perds le compte. J’envoie un message à Jo, pour qu’il se prépare lentement. Il habite à une heure environ, mais j’ai sûrement le temps. Maxi se réveille et voit le salon préparé pour l’arrivée du tout petit. Je lui dis que tout est ok, qu’il peut se recoucher. Je l’appellerai.
Cinq minutes plus tard, les contractions deviennent subitement si fortes que j’applique la technique de respiration apprise pendant les classes prénatales : inspirer profondément et expirer lentement, pendant plusieurs secondes, en émettant un son grave (afin d’éviter de bloquer sa respiration). Recommencer jusqu’à la fin de la contraction. Certaines femmes le font en comptant les secondes. Dans notre cours, on prononçait les 5 voyelles de l’alphabet. Ces 5 expirations sont généralement suffisantes pour couvrir la contraction.
Maxi m’entend, se lève et s’habille. Finalement, ça n’attendra pas !
Je fais plusieurs aller-retour entre les toilettes et la salle de bain. Je vérifie que l’eau coule à bonne température pour pouvoir y entrer à tout moment.
Les contractions sont trop rapprochées, je demande à Maxi de m’amener un seau pour les selles, car je ne peux plus me rendre aux toilettes, trop concentrée sur mes cinq voyelles.
Puis subitement, survient une contraction plus forte que toutes les autres, accompagnée d’un puissant cri rauque qu’il m’est impossible de réprimer (waw, les enfants ne se sont pas réveillés !!), et d’une envie irrépressible de pousser.
J’enjambe de suite la baignoire, toujours vêtue du haut de mon pyjama.
À ce moment, j’entends un « plop » : la poche des eaux vient sans doute de se rompre.
Nouvelle envie violente de pousser. Nouveau cri. Je palpe avec mes doigts : on dirait que je sens la tête ! Nouvelle poussée dans un effort surhumain, et la voilà qui sort !
– « Maxi, la tête est sortie ! »
– « Quoi ? Déjà ? »
– « Oui ! Tiens-la ! »
Je pousse une dernière fois, et voilà le bébé, ce miracle de la vie, cette chose jusque là irréelle, qui nous apparaît en chair et en os.
Ça a beau être la 3e fois, ce moment est toujours aussi émouvant et incroyable. Impensable. Comment la nature peut-elle être aussi bien faite ? Nous restons muets de stupéfaction devant cette petite créature la plus parfaite et la plus merveilleuse au monde.
Voilà ? C’est fait ? Déjà ? Maxi regarde l’heure : 4h20. Tout le processus a duré 1/2h.
Il appelle Jo : « le bébé est sorti ! Qu’est-ce qu’on fait ? »
Jo nous demande d’évaluer l’abondance du saignement, ce qui n’est pas facile puisque je suis dans le bain. L’eau est toute rouge, mais pas opaque, et je me sens bien. Donc pas d’inquiétude. Le cordon ombilical peut attendre. L’expulsion du placenta aussi.
Ok, je sors du bain le bébé dans les bras, encore raccordé à moi, en m’appuyant sur Maxi. Il m’aide à marcher jusqu’au salon, où je m’installe dans le divan dans l’attente de Jo.
Il frappe à la porte 40 minutes plus tard. On allume les lumières, on se salue, ce qui réveille les enfants ! D’abord Maxou, qui arrive tout étonné par ces voix et ces lumières fortes. Il fait connaissance de Thibault, le visage illuminé par un large sourire.
Puis c’est au tour d’Ulysses de faire son apparition et de se surprendre : pas un mot, mais son regard et son sourire en disent long. Quelle magie ! D’ailleurs, dès le cordon ombilical coupé et le bébé examiné par Jo, Ulysse s’empresse de prendre son petit frère dans ses bras.
Pendant ce temps, je me mets en position pour expulser le placenta, accroupie sur une serviette de bain. Les contractions qui accompagnent l’expulsion ne se font pas attendre. Et hop, voilà la dernière étape de cet accouchement accomplie.
Tous fatigués par cet événement et par le réveil nocturne, nous prenons congé de Jo en le remerciant de tout notre cœur et nous nous remettons au lit.
Je remercie le ciel d’avoir eu trois grossesses « sans risque » et trois accouchements sans complications. Le bébé s’est positionné tête en bas plusieurs semaines avant la date prévue à chaque fois, et je n’ai pas eu besoin de points de suture ni d’autre intervention avant, pendant ou après l’arrivée des bébés.
Mais je pense que ce n’est pas uniquement dû au hasard. J’étais bien entourée, j’ai bénéficié depuis le début de la confiance et du soutien inconditionnel de mon conjoint, malgré les doutes que lui ou nos proches pouvaient avoir. Je vis dans un environnement que j’aime, dans la nature, au calme, et j’ai pu arrêter de travailler pendant ces périodes.
Tout cela, ainsi que mon état d’esprit, ma certitude que tout devait et allait bien se passer, ma conviction que je serais mieux chez moi qu’à l’hôpital, le fait que je parvienne à visualiser mes accouchements (surtout le 3e), ainsi, sans doute, que mon alimentation saine et l’exercice physique quotidien (du fait de l’endroit où je vis), a beaucoup contribué, je pense, au bon déroulement des grossesses et des naissances.
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